"L'intelligence artificielle (IA) est en passe de devenir une composante essentielle de notre pratique médicale quotidienne, qu'on le veuille ou non." Pour le Professeur Patrick Van De Voorde, spécialiste en médecine d'urgence à l'Université de Gand (UGent) et Président de la Belgian Society of Emergency and Disaster Medicine (BeSEDiM), il est crucial d'explorer les perceptions actuelles et l'utilisation réelle de l'IA dans le domaine de la médecine d'urgence.
Dans une étude récente , un large groupe de prestataires de soins en médecine d'urgence (MU) et en services médicaux d'urgence (SMU) a été interrogé de manière rigoureuse, révélant des résultats à la fois instructifs et surprenants. "Même si le groupe de répondants ne représente peut-être pas l'ensemble des praticiens, étant probablement composé de professionnels plus expérimentés ou intéressés, ces résultats sont indicatifs de la direction dans laquelle nous évoluons," explique le Professeur Van De Voorde.
Les prestataires de soins en médecine d'urgence sont souvent les premiers à adopter de nouvelles technologies, et cette enquête ne fait pas exception. Le groupe de répondants s'est montré globalement positif à l'égard de l'IA, en soulignant ses avantages potentiels non seulement pour l'administration, mais aussi pour des aspects cliniques, tels que la reconnaissance des maladies graves lors du triage ou la détection de fractures sur les images médicales. "Il est encourageant de voir cet enthousiasme pour l'IA, qui reflète l'ouverture de notre communauté à l'innovation," ajoute le Président de la BeSEDiM.
Cependant, l'étude a également révélé une réalité plus nuancée : malgré l'intérêt manifeste, l'utilisation réelle de l'IA reste très limitée, se concentrant principalement sur l'imagerie médicale ou des cas rares d'utilisation directe de systèmes comme Chat GPT. "C'est surprenant de constater que l'usage effectif est encore si restreint, malgré l'intérêt théorique élevé," observe le Professeur Van De Voorde. En outre, environ 10 % des répondants ont déjà été confrontés à des échecs ou à une IA sous-optimale, ce qui devrait tempérer l'enthousiasme ambiant. "Ces résultats soulignent l'importance d'aborder l'IA avec un équilibre entre espoir et vigilance," précise-t-il.
Pour que l'IA ait un véritable impact en médecine d'urgence, le Professeur Van De Voorde identifie trois axes de progressions nécessaires : la science, la formation et les stratégies de mise en œuvre. "Nous devons avancer simultanément dans ces trois domaines pour intégrer l'IA de manière efficace et sécurisée," souligne-t-il. De plus, le développement d'un cadre juridique et éthique clair est impératif pour encadrer l'utilisation de l'IA, garantissant ainsi qu'elle serve au mieux les intérêts des patients tout en respectant les normes de pratique médicale.
L'IA est indéniablement en train de remodeler le paysage de la médecine d'urgence. Comme le conclut le Professeur Van De Voorde, "L'avenir de l'IA dans notre domaine dépendra de notre capacité à naviguer prudemment entre innovation et régulation."
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